Mort Paul Ricard – Il a mis au point une pâte devenue célèbre dans le monde entier. Cependant, le Ricard n’est pas seulement associé aux apéritifs de la région ; il était un passionné de sport et fit construire une piste au Castellet en son honneur.
Patrick Ricard est décédé sur son île.
Le patron de Pernod-Ricard est décédé vendredi des suites d’une crise cardiaque. Il résidait à Bendor, le refuge acheté par son père, Paul. Une saga familiale tragique qui tourne brusquement court. Dans le calme, les amis se retrouvent pour dîner sur l’île de Bendor, le domaine de la famille Ricard au large de Bandol (Var).
Parmi les invités figuraient l’ex-ministre Roselyne Bachelot, le directeur du point Franz-Olivier Giesbert et le président du Championnat du monde de pétanque La Marseillaise Michel Montana. Mais le destin en a décidé autrement : Patrick Ricard, PDG de Pernod-Ricard et numéro deux mondial des vins et spiritueux, est décédé vendredi après-midi d’une crise cardiaque à l’âge de 67 ans. Une grave dépression l’a ensevelie dans son hamac.
“Nous avons appris la nouvelle alors que nous étions en route”, a déclaré son ami Franz-Olivier Giesbert. Patrick était timide et hésitant. C’était agréable de s’asseoir avec lui et de regarder la mer. Je me sens mal de ne pas lui parler suffisamment ou de ne pas lui dire à quel point je l’apprécie. Il n’avait rien à voir avec les chefs d’entreprise pompeux décrits dans les médias.
C’était aussi doux que possible. Sans dire un mot, il a transformé l’entreprise en quelque chose de vraiment remarquable grâce à ses efforts inlassables. Corinne, sa femme, était son lien avec le monde extérieur. Et Bendor était son refuge. Son refuge de prédilection pour la lecture, l’observation des lézards et la navigation de plaisance : l’île.
Le “petit jaune” a été créé par son père, négociant en vins.
Entre Marseille et Bandol, dans un monde où la pétanque prospère, un récit familial est né. Son père, négociant en vins dans le Marseille d’avant-guerre, y découvre le pastis et popularise son « petit jaune », mélange d’anis et de liqueur, à l’aide de la pointe d’un roseau.
Cependant, le dernier bastion des Ricards se trouve sur les îles des Embiez et Bendor, conquises dans les années 1950. Paul, le fondateur de l’empire, est enterré dans les Embiez au sommet d’un énorme rocher blanc qui surplombe l’eau.
L’été, toute la famille se retrouve au « Château », villa ornée d’œuvres d’art contemporaines soigneusement choisies par Corinne (dont des toiles de Jean-Michel Alberola et Tom Wesselmann et des photographies d’Orlan). Quelques peintures de membres de la famille sont également exposées.
“Patrick y était très attaché car il recueille les souvenirs de Paul, qu’il admirait beaucoup”, confirme Philippe Gurdjian, ami de cinquante ans et directeur du circuit Paul_Ricard. Juste au coin se trouve un musée touristique avec une collection de tous les produits de la marque depuis sa création en 1932.
Cela comprend de tout, des carafes et cendriers aux verres et affiches. Patrick Ricard était revenu jeudi matin aux Embiez à bord de son bateau à moteur de 34 pieds pour s’assurer que “tout allait bien”.
Les habitués pouvaient apercevoir de loin son énorme silhouette. Pour cet événement spécial, il a enlevé sa tenue PDG. Patrick Longueville, directeur du port, se souvient : « Il venait tous les jours faire un coucou, puis il faisait de la plongée tout seul, au milieu des douves. Son bateau, c’était son indépendance, il aimait le nettoyer lui-même et l’utilisant pour le ski nautique. Patrick était plus qu’un puissant magnat des affaires : il prêchait par l’exemple.
Le Paul Ricard ne s’est pas réveillé jeudi matin. Ses amis et sa famille disaient : « Il n’était pas malade ; il souffrait simplement de l’ennui de la vieillesse. » Une disparition paisible pour un homme de 88 ans dont l’œuvre de vie a été la création du pastis marseillais qui est devenu tout un art de vivre. Il ne s’occupait plus depuis longtemps de la gestion quotidienne des affaires. En 1968, il passe les rênes à son fils adulte, Bernard, sur l’un de ses légendaires head shots.
Le sponsor clérical et autoritaire espérait faire une démonstration spectaculaire de sa colère contre le gouvernement et ses contrôles par tatillons. Même si son départ fait des vagues dans le monde patronal de l’époque, l’événement « ricardien » n’a pas eu le « rétention souhaité » que les émeutes de mai ont occulté.
Cependant, malgré trente années supplémentaires, la légende de l’empereur de l’empire Pastaga persiste. Sans aucun doute puisque le parcours du Paul Ricard contient tous les ingrédients d’un récit hors du commun.
Les débuts d’une petite distillerie sur fond de Prohibition. Le premier à s’adonner aux activités de braconnage, de cueillette de plantes aromatiques et de production artisanale de pastis fut le vieil Espagnol.
Depuis l’interdiction des liqueurs anisées en 1915, cet ami de la famille Ricard faisait son breuvage au garage comme tout bon provençal. C’était entre les deux guerres, et le scandale de l’absinthe avait jeté la suspicion sur toutes les boissons anisées. La pagaille espagnole est le couronnement du Paul Ricard.
En tournée avec la société de vente de vins de son père, il envisage déjà son retour dans le secteur de l’apéritif. Et lorsque la Prohibition prend enfin fin en 1932, il est prêt à faire la fête comme en 1933. L’ingrédient secret : un mélange d’anis vert et d’anis éthéré, teinté d’une pincée de safran pour refléter le style individuel du cuisinier.
Depuis l’hiver 1932, il en a vendu 250 000 litres. Béni par le Pape. Il place tous ses atouts marketing sur la marque. Il ne vend pas de pâtisseries, mais du « Ricard », et il va jusqu’à se faire bénir au Vatican par le pape Jean XXIII en mars 1961, qui lui adresse ses meilleurs vœux pour le succès de la « fabbrica Ricard ».
Seule la Seconde Guerre mondiale a stoppé la montée en puissance de Ricard ; Aujourd’hui, la marque se proclame fièrement n°3 mondial après les leaders du marché Bacardi Rum et Smirnoff Vodka.
Même si le whisky est la boisson alcoolisée la plus vendue, le pastis reste la boisson la plus populaire du pays. Ses meilleurs résultats sont visibles dans les livres des coffee shops du nord et de l’ouest de la France.
Ce monde merveilleux du Paul Ricard. Un dirigeant de l’entreprise a résumé cette tendance omniprésente du paternalisme dans le monde des affaires en disant : « C’était un partage ultralibéral ». Selon un religieux marseillais, travailler pour Ricard est le summum du bonheur humain.
Charles Pasqua, ancien directeur commercial de l’entreprise, a un aperçu. Pas moins du Smic majoré de 30 %, plus trois à quatre mois de salaire au titre de participation versés en mai juste avant les vacances d’été, et cela sans même compter dans l’actionnariat salarial institué en 1938.
Chaque année, une partie des bénéfices de l’entreprise est transformée en actions et reversée aux salariés. Les 1151 salariés recevraient chacun 4,5 pour cent du capital de l’entreprise, soit 380 millions de francs suisses. La fidèle gouvernante de M. Paul, Modeste Bovis, découvre en 1962 qu’elle est devenue cinquante fois millionnaire lors de son entrée à la Bourse.
Paul Ricard, fidèle à sa légende, n’hésite pas à transporter régulièrement ses collaborateurs dans des demeures côtières sur des navires de luxe ou à les inviter dans ses deux îles des Embiez et Bendor, qu’il fait « redécorées » avec des colonnes de ciment dorique et ionique.
Ricard le bob est en piteux état. Paul Ricard, multimillionnaire qui vit désormais isolé sur 1 300 acres d’espace vert au-dessus du circuit automobile du Castellet qui porte son nom, n’a jamais ignoré sa clientèle plus traditionnelle. Après le Tour de France, on voit les coureurs les plus stéréotypés courir avec un short et un Ricard. Carafes et cendriers sont récupérés par les fétichistes du petit jaune.
Mais son esprit était partout, des célébrations de Huma aux marins de Tabarly en passant par les expositions d’art. Malgré l’opposition de son père, qui ne considérait pas la peinture comme un véritable métier, sa vocation artistique a trouvé un débouché. Des milliers et des milliers de peintures de Paul Ricard sont exposées dans un musée dédié à l’artiste.
Environnementaliste en avance sur son temps, il s’intéresse depuis longtemps à la pollution en Méditerranée et s’est battu pour réduire les émissions de faucon à queue rousse des grandes entreprises chimiques.
Ainsi, le brave homme a recueilli le soutien d’un large éventail de personnes, parmi lesquelles des communistes de La Marseillaise et des membres de la famille Pasqua (sans oublier Dali, Fernandel, Luis Mariano et Tino Rossi).
Même les années sombres de l’Occupation n’ont pas pu tuer la légende. Il se cache en Camargue, où il cultive du riz et fabrique des essences de fruits pour les véhicules de la Résistance, tout en criant : “J’emmerde le maréchal Pétain et son gouvernement !”
Wall Street a accueilli avec enthousiasme la nouvelle de la mort de Paul Ricard, faisant grimper les actions de la société Pernod-Ricard de plus de 3 pour cent. Non pas par respect tardif, mais parce que les experts se demandent si les héritiers seront suffisamment coopératifs pour empêcher une OPA.
La société Ricard est partenaire de Pernod depuis 1975. Patrick, l’héritier présomptif, est actuellement PDG de l’activité Pernod-Ricard. Aujourd’hui, les familles Ricard et Pernod, ainsi que d’autres salariés, détiennent environ la moitié des actions avec droit de vote de l’entreprise. Paul Ricard, L’Homme qui lui ressemble, de Marie-France Pochna, Edité par P.A.U. Éditions, 1997.